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Interview pour Tutofig : Partie 1 (VF)

Interview pour Tutofig : Partie 1 (VF)

Interviews - Le 16 juin 2012

Voici la première partie d’une interview que j’ai eu le plaisir de faire pour le site internet : Tutofig. Des questions très intéressantes, sur des sujets variés, ce fut un vrai plaisir d’y répondre.

De par la longueur de l’interview, nous avons décidé de la scinder en deux partie. Bonne lecture :) !

(Vous pouvez d’ailleurs retrouver l’interview sur le site de Tutofig : ici.)

1 – Présentation: ton parcours figuriniste

- Julien, avant d’être un très bon peintre de figurine, étais-tu déjà artiste ? Sur d’autres supports peut-être ?

Houlà pas du tout ! Je suis incapable de réaliser le moindre petit dessin sur un bout de papier ou n’importe quoi d’autre. C’est d’ailleurs en parti pour ça que j’ai du mal avec les freehands !  En fait, ma découverte du monde de la figurine est arrivée, comme beaucoup, à l’adolescence. Je suis un énorme fan de jeu vidéo (j’y reviendrai), notamment de la saga « Zelda ». Or, il se trouve que l’un de mes camarades de l’époque du collège, jouait à Warhammer. Cela l’a conduit lors d’un repas, à me parler des elfes sylvains, « des sortes de petits Link », selon ses propos.  Et depuis je n’ai jamais décroché. J’avais 14 ans !

Donc non, je n’avais jamais testé de peindre ou sculpter quoique ce soit, ou d’avoir une approche artistique sur quelque support qu’il soit. Bien que ma mère ait peint dans sa jeunesse. Après je ne me qualifierai pas non plus d’artiste, loin de là ! Et pas avec ma production actuelle. Sans rajouter qu’il y a toujours cet éternel débat de « la figurine est elle un art ou pas ? »… Patati patata. J’imaginerai peut-être ce terme là quand je ferai des projets visant à dénoncer un fait, ou mettre en avant une idée ou un concept etc… Mais ce n’est pas encore pour aujourd’hui !

- Te qualifierais-tu de peintre “pro” ? Travailles-tu à coté ?

Du point de vue de la simple définition, je ne suis pas peintre professionnel puisque que je n’en vis pas. J’ai déjà eu l’occasion de rentrer dans certains studios afin d’en faire mon métier (on m’avait proposé de rejoindre les rangs d’Eavy Metal) mais je n’ai pas pu dire oui. Disons que c’est un ensemble de choses. On m’aurait proposé ça quelques années dans le passé, j’aurai peut-être accepté d’aller travailler en Angleterre par exemple.

À côté de ça, j’ai fait des études de journalisme. Et depuis 2006 environ, je réalise des piges pour le magazine Ravage. Dernièrement, j’ai effectué une reconversion totale en devenant plombier/chauffagiste. J’ai déménagé récemment, il faut retrouver le job !

- Je t’avais demandé de prendre une photo de ton atelier, mais avec un objet dessus qui te tient à cœur.

Eh bien voilà, on y arrive !

Donc ça, c’est mon nouvel atelier. Avec le déménagement pour du plus grand, j’ai désormais une pièce rien qu’à moi. Pour les objets qui sont sur le bureau, tu peux voir qu’il s’agit de manettes de consoles de jeux vidéo. Car, je suis un gros fan, un énorme fan de jeux vidéo. Je dis souvent que la figurine est ma seconde passion, parce que je suis bien plus un hardcore-gamer qu’autre chose.  J’ai la chance d’avoir un père qui a m’a offert une console dès mon enfance (la première Nintendo). Depuis j’ai possédé chacune des consoles ayant existées, toutes marques confondues.

Bref, je peins souvent un petit mois par-ci, un petit mois par-là, et je fais une grosse coupure de quatre à cinq mois de jeux vidéo. Ça m’a d’ailleurs souvent mis en retard pour des deadlines de concours comme le Golden Demon. Jouer des dizaines d’heures à des RPG, des jeux de réflexions, d’aventures ou de versus, ça n’aide pas vraiment quand tu dois boucler un géant ou un diorama dans les deux semaines. Et puis là, j’ai craqué sur Diablo 3 et je dois finir un Céléborn pour dans un mois…

D’ailleurs, c’est souvent ça. Je craque sur un jeu alors que j’ai une deadline, histoire de bien me mettre là tête dedans. Alors, quand tu rajoutes la vie courante et le boulot…

Plus sérieusement, et même professionnellement, je crois que j’aime bien travailler en ayant un peu de pression derrière. Ça me motive.

2 – L’inspiration et la méthode

– On a tous une méthode, ou une façon de penser quand on se lance dans un projet. À quoi penses-tu quand tu commences une figurine ou un diorama ?

En général tout part d’une vision. Ça peut venir d’une figurine précise, d’un dessin ou d’une idée de décor. Puis les éléments se mélangent et ça s’affine. Je ne fais jamais de croquis, je suis bien plus adepte du travail mental. Je finis souvent la figurine dans ma tête avant de la commencer.

Par exemple en 2009, lors d’une visite au Warhammer World, je suis tombé sur un magnifique dessin de Dave Gallagher. Ça m’a inspiré l’idée d’une ville de l’Empire (Warhammer Battle) le jour d’un carnaval. J’ai réalisé un diorama s’en inspirant mentalement depuis cette date, et je viens tout juste de le commencer, près de quatre ans après. Le temps que la conception s’affine. Après, je jongle aussi avec les impondérables que cette méthode fait apparaître.

À savoir que dans la tête les volumes s’accordent à te faire penser que tout va rentrer sur ton joli socle. Alors qu’une fois les éléments de décor en main… il faut bidouiller et faire des concessions (parfois) pour coller à ce que tu voulais représenter.

- Et l’inspiration d’ailleurs, ça vient d’où chez toi ? Films ? Univers numérique ? Livres….

Un peu comme tout le monde je pense. De toute manière l’inspiration est bonne à prendre partout. Musée, lecture, films, dessins. Une idée se retrouve souvent déclinées sous différentes formes par ailleurs : papier, numérique, volumes 3D, musique…

J’aime néanmoins beaucoup feuilleter des artbooks, et je lis pas mal (même si largement moins qu’à une période, où je me faisais le tome 1 du Seigneur des anneaux en moins d’une journée). La lecture est peut-être finalement le meilleur moyen de développer ses idées en y réfléchissant. Car, elle te force à faire travailler ton imagination, en te faisant créer une image à partir de mots. La création est presque totale, car si la couleur et la forme ne sont pas décrites, c’est à toi de te débrouiller.  Un dôme décoré, une colonne, ou tout simplement une route de pierre bordée de végétation, peuvent avoir de nombreuses déclinaisons. De là peuvent découler de nombreuses idées de décors, ou de mises en situations.

Après bien sûr il y a l’inspiration que nous procure le travail d’autrui, mais je vois qu’il s’agit de la question suivante, alors hop on va sauter à la ligne !

- Au fil des années, qui t’as inspiré dans le monde la figurine ? C’est toujours les mêmes qui te font rêver aujourd’hui ?

De nombreuses personnes. Çà paraît cliché, mais comme dit précédemment l’inspiration est bonne à prendre partout et sans distinctions ou dépréciation de genre. Ainsi, il arrive souvent de trouver des idées fabuleuses sur des armées de joueurs purs et durs. Idées qui ne sont pas toujours aussi facile à mettre en œuvre que ça derrière. Il ne faut rien négliger.

Après la liste est longue. Je vais essayer de la faire la «plus complète possible », ça permettra aux lecteurs qui le veulent de rechercher leurs travaux sur Internet, ça vaut le coup d’œil.

En matière de fantastique :

France : Allan Carrasco, Rémy Tremblay, Jérémie Bonamant, Jacques-Alexandre Gillois, Bruno Grelier, Thomas David, Benoit Ménard, Christophe Bauer, Laurent Expostio Mas, David Waeselynck, Stefan Kochowski, Maxime Penaud, Axel de Mohrenschildt , Jérôme Otremba, Maxime Pastourel, Nicolas Rouanet, Vladd Jünger, Guillaume Lemas, Steve Party, Bruno Grelier, Thomas Barse, Cyril Abati, Olivier Herblot.

Belgique : Aliaume Chapelle, Cédric Lurkin, Patrick Corhay, Michaël Delcroix.

Suisse : Mathieu Rouèche.

Australie : Sébastian Archer, Kyle Morgan.

Angleterre : Matt Parks, Joe Tomasweski, Darren Latham, Joe Hill, Mark Tait, Steve Buddle, Brian Nelson, Jes Goodwin, les frères Perry.

Allemagne : Ben Komets, Matt Cexwish, Raffaelle Picca, Stephan Rath.

Espagne : Joaquin Palacios, Rafael Garcia Marin, Raul Garcia Latorre, David Rodriguez, Fernando Prieto, Alfonso Giraldez, Jose Manuel Palomares, Javier Gonzalo Lozano, Ruben Martinez, Ruben Perez Alonso, Luis Gomez Pradal.

Italie : Andrea Ottolini, Fabrizio Russo, Angelo Di Chello.

Pologne : Bogusz Stupnicki (aka Bohun).

Russie : Kirill Kanaev, Natalya Melnik.

USA : Marike Rimer, Jennifer Haley, Todd Swanson, Chris Borer, Tim Lison, Dave Taylor.

Canada : Vincent Hudon, Mathieu Fontaine.

Danemark : Jacob Rune Nielsen.

En historique je citerai pèle-mèle : Marijin Van Gils, Bill Horan, Mike Blank, Diego Ruina, Danilo Cartacci, Mariano Numitone, Sylvain Deschamps, Kostas Kariotelis, JP Dana, Louis d’Orio, Philippe Gengembre, Jean-Philippe Prajoux, Daniel Ipperti.

Et avec ça c’est déjà pas mal. J’en oublie encore pas mal mais j’ai un peu mal aux doigts ! Tour ça pour dire aussi que je suis un gros curieux, et que j’aime regarder le travail de tout le monde. J’adore fouiner sur le net.

Il faut aussi dire que lorsque que je voulais progresser et tenter de gagner mon premier Golden Demon, je passais des heures à lire et regarder les palmarès des Golden Demon français et étrangers. Ce qui m’a finalement poussé à regarder le travail d’énormément de gens, dont je continue à suivre les travaux avec intérêt.

3 – La vision du marché de la figurine aujourd’hui

- Je sais que tu peins beaucoup de figurines Games-Workshop, tu y joues je crois ? GW c’est aussi une grosse machine qui brasse beaucoup d’argent. Est-ce que ce n’est pas un peu trop ? Le but est-il plus de vendre beaucoup au détriment de la qualité ?

J’y ai joué. En fait avant de vouloir gagner un Golden, je jouais énormément, j’ai testé presque toutes les armées de Warhammer Battle et de 40K. À l’époque de la grande campagne nationale « la treizième croisade noire d’Abaddon », j’avais même fini premier les trois jours d’affilé au tournoi du magasin Paris 8. Depuis j’ai tout oublié des règles de Warhammer et de 40k. J’ai refait une partie il y a environ un an de ça, j’ai cru lire du latin.

Si je rejoue à un jeu dans le futur (hormis jeu de plateaux), ce sera définitivement de l’escarmouche. Moins de figurines à peindre, sur lesquelles je pourrais plus me faire plaisir, et système de jeu plus simple. Je me tournerai sans doute vers Eden d’ailleurs. On ne me dit que du bien de ce jeu, et le gang des Jokers ou celui de la Résistance me plaisent beaucoup.

Ensuite, que Games-Workshop brasse beaucoup d’argent, j’ai envie de dire tant mieux ! Bon après si la redistribution se faisait moins vers les actionnaires se serait génial, mais ça c’est un tout autre débat. GW est le leader incontesté du wargame de masse fantastique depuis plus de 25 ans. Ils écrasent tout, ce sont de véritables rouleaux compresseurs. Leur stratégie commerciale est impeccable, ils ciblent juste, ils savent fidéliser, et amener les nouveaux clients. Il faut être réaliste quelque part. On parle d’une entreprise cotée en bourse, on est plus dans le bac à sable. La logique de GW est de faire du profit, ni plus ni moins, et de vendre toujours plus. On est loin des débuts fanboys des années 80/90.

On pourrait croire que cela aurait tendance à tirer la qualité vers le bas. Or, c’est tout le contraire. Games-Workshop est l’entreprise qui investit le plus dans les nouvelles technologies du hobby, que ce soit dans l’impression 3D ou dans le moulage. J’ai connu l’entreprise et ses produits dans les années 2000 et douze ans plus tard, je suis sidéré par la complexité et l’ingéniosité des kits que la firme anglaise parvient à produire.  Les kits du géant, du trygon, du carnifex, de l’Arachnarock, des derniers ogres, ou les derniers kits de l’Empire et des nécrons sont juste fabuleux. Ils sont les parfaits exemples de l’augmentation de la qualité des produits GW. On peut rajouter à cela l’idée ingénieuse de la gamme des généraux Warhammer Battle à 10,50 euros. Les sculptures de Brian Nelson sont ahurissantes. Les découpes sont très précises, et le tout est charismatique. Forcément un super produit, « pas cher », c’est fait pour en vendre des kilotonnes.

Pour moi, sincèrement, la qualité ne fait qu’augmenter. Il y a certes le secteur Finecast qui connaît pas mal de déboires. La faute à un contrôle qualité rigoureux, et peut-être à un manque de technique du à sa jeunesse. Mais, contrairement à beaucoup de personnes, je doute que GW ne rectifie pas le tir.

Ils ont investi beaucoup, et cherche à développer la production résine. Il faut se souvenir des premiers kits plastiques. C’était très loin de ce que l’on achète aujourd’hui. Je pense que les quatre ou cinq années à venir nous réservent pas mal de surprises du côté Finecast. Concernant la considération des clients, il ne faut pas rêver. On représente un portefeuille pour GW, ni plus ni moins. Mais venant d’une entreprise avec un tel poids de rentabilité sur les épaules, çà ne me choque pas. Le monde des bisounours, c’est un peu naïf d’y croire encore.

- Il existe d’autres éditeurs de jeux de figurines. Le marché n’est pas facile. Tu penses que c’est possible de bâtir un autre empire comme GW pour une nouvelle gamme ? Où du moins de tirer son épingle du jeu ?

Le marché n’est pas facile car on est dans une niche de luxe. Faire des gugusses ça coûte excessivement cher, et je dis çà en n’étant plus joueur ! Il n’y a aucune place pour ceux qui n’ont pas les reins solides, un très bon projet, et un capital de départ. Sans oublier que la communication fait pour beaucoup en plus d’avoir un produit de qualité. Il est aussi peut-être plus dur de s’implanter en France qu’ailleurs. On peut voir que Privateer Press s’est très bien lancé aux Etats-Unis. Dans l’hexagone ça reste un jeu « secondaire ». On peut aussi revenir sur la mort de Rackham.  Dans l’imaginaire collectif Rackham était la seconde entreprise derrière Games-Workshop. Et ce n’est pas tout à fait faux. Sauf que GW était déjà un Everest quand Rackham ressemblait plus à la petite colline au coin de la rue. Les deux entreprises n’ont jamais joué dans la même cour.  Ainsi, dans un secteur où GW s’impose depuis deux décennies, faire sa place est encore moins aisé.

Or, avec la mort de Rackham, beaucoup se sont dit, surtout en France, tiens il y a une place à prendre ! GBA, Mortebrume, Ilyads Games, Alkemy, et j’en passe, de nombreuses petites sociétés se sont succédé et se sont cassé les dents. Et il y en aura beaucoup d’autres. Encore une fois il faut un produit innovant… mais pas trop. Je vois que CMON lance sa gamme avec une sorte d’armée d’hommes porcs… pour moi s’est voué à l’échec, et la communication manque déjà cruellement. Si les sculptures ne suivent pas derrière c’est encore moins la peine.

Il faut rester sur des concepts simples. Pourquoi Privateer Press fonctionne ? Parce qu’on reste sur du med-fan uchronique, et parce qu’ils avaient direct des sous à aligner sur la table.

Pourquoi Mantic va cartonner ? Parce que ce sont tous des anciens hauts-placés de GW, qui connaissent le marché sur le bout des doigts, ses rouages, les désirs des clients récents et anciens, qu’ils connaissent la stratégie de GW sur les quatre/cinq années à venir et qu’ils ont une grosse manne financière. Peu d’entreprises peuvent se targuer de commencer à faire du jeu de masse avec production de grappes plastiques. Ça se chiffre en centaine de milliers d’euros, voire plus. Largement même. Là, ils font de l’appel du pied aux nostalgiques. Les nains et les hommes-rats de l’espace, un SpaceHulk like sous la forme de Pandora… à côté on fait du fantasy « commun » : armée de morts-vivants, elfes gentils et méchants, nains démoniaques, orcs et gobelins… Ça ne te rappelle rien ? Or, le style graphique fait comprendre ce que sont les figurines, tout en se différenciant de GW (mais pas trop non plus). Et c’est vendu moins cher. Pour moi Mantic est la société à suivre.

Tout ce qui est jeu d’escarmouche secondaire, je dirais que ça tiendra le temps que ça tiendra. Peut-être une dizaine d’années pour les meilleurs, mais je vois mal un jeu d’escarmouche s’imposer mondialement avec ce qui est actuellement présenté. Il faut vraiment un maximum de capitaux pour conquérir un marché déjà difficile et saturé. Les jeux de masses c’est encore plus dur et la logique financière est encore plus vraie en ce cas là. Les deux seules entreprises qui ont réussie à se lancer : Mantic et Privateer Press. C’est en centaine de milliers, voire en millions qu’on parle.

Bref je vois mal une énorme surprise sortir d’un chapeau. Ceux qui s’imposeront joueront sur des codes établis et désirés par la clientèle. En plus d’avoir un pôle communication du tonnerre.

- Pourquoi c’est devenu aussi dur pour les éditeurs/ pour les boutiques de figurines, a tel point que pas mal d’entre eux disparaissent, ou diversifient leur vente avec d’autres activités (jeux plateaux, jeux de rôle….)

Dans un marché saturé si tu arrives avec un mauvais concept, un produit moyen en terme de qualité, et qu’en plus tu le vends mal, ne va pas t’étonner si tu te casses les dents. Mortebrume, GBA en sont vraiment les parfaits exemples. Alkemy aussi en quelque sorte. Sauf qu’il y avait un suivi de communication et que les figurines cartonnaient. Mais le produit détonnait trop à mon sens des attentes des joueurs, çà n’a pas accroché leurs intérêts. D’autant plus qu’il faut un excellent système de jeu, j’ai oublié d’en parler.  J’aimerai bien me remettre à jouer. J’ai parcouru certains ouvrages, au bout d’un moment j’ai décroché. Alkemy c’était de l’escarmouche, avec un bouquin de règles gigantesque de 128 pages, perso j’ai trouvé ça indigeste. En plus de ne pas accrocher sur les armées proposées. Je pense que pour de l’escarmouche il faut vraiment faire fluide et simple. Que le tout tienne sur un petit livret grand maximum. D’où mon intérêt pour Eden : 32 pages.  Pour le jeu de masse c’est différent, le système pousse aux cas particuliers.

Pour les boutiques, honnêtement je ne saurai pas dire. Mais bon, Internet et le marché en ligne sont une sacrée concurrence. D’autant plus que GW impose de belles conditions à ses revendeurs, quitte à ce que cela les mette la tête dans l’eau. Se diversifier sur le jeu de plateaux est une bonne idée. D’autant plus qu’il le faut pour survivre. Un magasin ne faisant que du wargame est mort dans l’œuf. Le marché est une niche trop petite, et si l’on n’est – en plus – pas bien situé… Le jeu de plateau lui ne cesse de grimper, d’autant plus qu’il s’est toujours plus ou moins bien porté. En Allemagne le marché est porteur. En France il y a un vrai retour vers ce secteur.

4 – Les concours

- Tu as participé à pas mal de concours, Games day, concours Open histo ou fanta… Mais pour quelle raison y vas-tu ? Montrer tes figurines ? Échanger ? Gagner ?

Je n’ai jamais caché que lorsque que je vais à un Golden Demon, c’est pour repartir avec une statuette. Ce n’est pas aujourd’hui que je vais commencer à dire l’inverse. Gagner un démon c’est grisant. Le GD reste le concours de référence en matière de figurines fantastiques. Cela au niveau mondial. Encore une fois car GW est le leader incontesté.  Le GD pousse aussi à deux choses : finir dans une deadline impartie, et finalement, à progresser d’année en année pour espérer décrocher encore une fois une statuette. À force d’y aller, on se tire la bourre avec les autres et du coup on progresse.

C’est d’ailleurs quelque chose qui m’a souvent fait marrer sur les forums. Ceux se targuant d’aller au GD pour « voir du monde, passer un bon moment » mais surtout pas pour gagner, ne se faisait jamais prendre à parti, bien que la plupart déposait quand même une ou deux pièces au concours (ben voyons, pas folle la guêpe !). Alors que ceux y allant pour repartir avec un démon, le disant, se sont toujours fait tirer dessus à boulet rouge. Car on ne peut pas y aller pour gagner, tout en prenant plaisir à voir ses copains. C’est totalement incompatible apparemment. Ou quand la fausse modestie flirte avec la mauvaise foi en somme…

Y aller pour tenter de gagner n’empêche pas de passer un bon moment avec les copains, un jour il faudra que ça rentre dans certaines têtes. D’autant plus qu’une fois sur place, heureusement qu’ils sont là. Car, quand on n’est pas joueur, il n’y a pas énormément de choses à faire.  L’échange avec les autres participants, les amis, se fait naturellement. Et ça permet aussi de rencontrer du monde, de découvrir de nouveaux styles, de nouveaux talents, de nouvelles sources d’inspirations…

Les concours Open sont totalement différents. Il n’y a pas d’enjeu réel, vu qu’il y a autant de médailles que de méritants. On y va de base pour passer un bon moment et rien d’autre. Ce sont souvent des salons plus familiaux, plus intimistes. Chacun avec leurs particularités et leur ambiance. Aucun ne se ressemble. Alors que quand tu vas un GD, tu les as tous fait, quelque soit le pays.

- Les concours ont-ils changé au cours des années depuis tes débuts ?

Globalement je pense que non, Open comme GD. Chacun reste sur sa ligne. En revanche je dirais que la participation globale est en berne, tout comme l’émulation générale. Le niveau général a véritablement grimpé en flèche. Quand, avant, il y avait trois/quatre personnes qui dominaient par catégorie parmi tous les autres concurrents, désormais on est sur une ou deux dizaines qui sont dans le même panier. Ce qui noie le poisson dans l’eau.

Dans le cas particulier des Golden Demon, je dirai que les derniers auxquels j’ai participé, en deux minutes tu savais quelle pièce allait remporter la Slayer Sword. Et derrière tu as deux, voire trois figurines qui se détachent en étant réparties sur l’intégralité du concours. Le reste des catégories étant remplies de pièce de bon niveau mais se parasitant les unes les autres. Finalement, il y a plus de redites et un manque de parti prit. Avant le suspens pouvait durer jusqu’à la remise des prix et tu repartais d’un GD où chaque figurine dans le palmarès te faisait réfléchir. C’est un peu la magie d’Internet. Quand j’ai commencé les forums n’existaient pas (j’ai l’impression d’être un dinosaure, ça ne date que de 2004 pourtant), donc chacun se forgeait son identité et devait se démener pour progresser et trouver de nouvelles techniques.

Désormais, il y a Google. Le moindre aspect technique de la peinture d’une figurine peut-être déniché en moins d’une minute. D’où la progression générale, avec une uniformisation totale. En tout cas, quand je vais à un GD je ne repars plus avec des étoiles pleins la tête. Je ne dis pas que les palmarès ont à démériter, mais il y a moins de rêve qu’avant. Après, en ayant progressé moi-même cela joue aussi peut-être. Mais bon je deviens peut-être tout simplement un vieux con hein.  En revanche l’uniformisation est vraiment visible.

- Gagner un golden demon, ou une slayer sword, ca apporte quoi ? Ca a changé quoi pour toi ?

Honnêtement ça n’apporte rien. Çà te fait connaître de ceux qui s’y intéressent, et je dis bien ceux qui s’y intéressent. Et c’est vraiment tout. Çà ne te fais pas gagner d’argent en tout cas. Ceux qui pensent que parce que tu gagnes un ou trente démons, du coup tout ceux qui recherchent un peintre pour des commissions vont venir cogner à ta porte, se mettent le doigts dans l’œil très profondément. Mais on reviendra après sur la question des commissions.

J’ai trente démons et on me demande très peu de commandes. Après, je ne communique pas particulièrement. Je ne me mets pas en avant sur ce sujet, donc forcément, ce qu’il en ressort, c’est que je ne suis pas intéressé plus que ça par le fait d’en prendre. Et c’est vrai. Je n’en ai pas besoin pour vivre. Quitte à consacrer du temps pour peindre, je préfère le prendre pour moi ou pour mes amis. Mais que tu ais un démon ou pas, du moment que tu fais savoir que tu fais des commissions, que tu en recherches et que tu fais du bon travail, ça vient vers toi de la même façon. Le démon à la limite fait office de gage de qualité mais rien de plus. (Et encore, cela reste sujet à discussion. Car, d’une année à l’autre, d’une catégorie à une autre, gagner un démon n’est pas aussi difficile que la plupart des gens l’imagine. C’est vraiment très abordable).

Ça n’interpelle pas non plus les sociétés. Ce n’est pas le nombre de trophées qui importe, c’est ton travail général. Je sais que les offres qu’on m’a faites viennent de mon travail, plutôt que des presse-papiers en résine accumulés. Vraiment, professionnellement ça ne change rien. Ceux qui veulent acheter une pièce de concours savent le prix que ça vaut. Avoir un démon ne te fait pas monter les prix. Cela arrive bien sur, mais c’est assez rare. Une figurine vaut le prix que la personne est prête à mettre dedans de toute manière. Derrière c’est le jeu de la négociation et du culot c’est tout.

Pour la Slayer Sword c’est la « récompense ultime », mais encore une fois mis à part te faire plaisir, c’est tout ce que ça apporte. D’autant plus qu’il faut la relativiser, cela reste un trophée donné par une marque sur quelque chose qu’elle juge digne de représenter sa gamme.  Ça fait quelques années que je m’étais engagé dans une course à la Slayer, et finalement ça n’a pas servi à grand chose. Je sais qu’en gagner une ne changera rien à ma vie, du coup j’ai lâché l’affaire. J’en veux toujours une, mais pour être passé très proche trois ou quatre fois, je me dis qu’elle viendra quand elle viendra. Là, j’ai un gros diorama à finir. Plutôt que de le boucler pour le prochain GD, si je dois le faire sur trois ans, je le ferai sur trois ans. D’autant plus que cela fait déjà quatre ans que je ne fais que de le murir dans ma tête. Alors, je ne suis plus à ça prêt.

Si ça m’apporte enfin une Slayer tant mieux. Sinon tant pis. Je sais que j’ai globalement ce qu’on pourrait qualifier de « niveau Slayer Sword », ça se suffit en soit. Moi qui voulais gagner un Golden comme « rêve » d’adolescent, le parcours effectué se suffit aussi à lui-même. Cela m’a permis de faire des rencontres fabuleuses, des gens que je considère comme faisant parti de ma famille aujourd’hui, ce qui est vraiment bien plus important et d’autant plus inattendu. Alors avoir une épée à la maison, oui ce serait sympa. Mais mis à part ne faire plaisir qu’à soi, çà ne change vraiment rien d’autre.

- Pourquoi ne pas faire gagner de l’argent aux vainqueurs de grand concours ? Après tout le Golden demon existe parce que des peintres payent pour y participer. Certains concours rémunèrent les vainqueurs, avec des sommes importantes parfois, qu’en penses-tu ?

C’est ce que propose le Crystal Brush, lancé par Coolminiornot. Je dirai que c’est à suivre, mais que cela va être à double tranchant. Déjà, concernant ce concours l’implantation géographique pose problème, c’est au États-Unis. Or même les américains, à l’époque de l’organisation de quatre Golden Demon différents – au cours de la même année – sur leur territoire, ne se déplaçaient pas de l’un à l’autre. Depuis qu’il n’y a en plus qu’un seul, cela reste pourtant la même chose. Donc peu d’étrangers vont faire le trajet et les locaux ne vont pas forcément se déplacer pour cela.

À la première édition, il y a eu pas mal de pièces, et un bon, très bon niveau général. Tout le monde rêvant de gagner l’un des trois prix : 10.000$ pour le premier, 2000$ pour le second, 1000$ pour le troisième. Il y a un souci de répartition flagrant. Bref, cela a amené quelques étrangers (tout au plus une douzaine, c’est donc peu) mais du niveau.

Résultat pour la seconde édition, une participation largement en berne. Tout comme le niveau général. Le top 3 se détachant clairement en une minute. Ceux de l’année passée, découragés par le niveau général et sachant que les trois prix sont presque inatteignables ne sont donc pas venus. Or, avec le coût de l’organisation, donner 13.000$ pour tout juste cent participants (et encore), ce n’est pas rentable sans autre formes de rentrées d’argent. Et je ne suis pas sûr que les partenaires tiennent sur le long terme si l’engouement ne décolle pas. Comme dit sur un forum, j’ai vu des concours locaux avec un niveau bien plus imposant et une qualité générale bien meilleure. La faute à l’importance des prix et sa mauvaise répartition, les gens ont eu peur.

Je pense que, quitte à donner de l’argent, dans le cadre du Crystal Brush, il faudrait le répartir entre toutes les catégories. Pas seulement entre le top 3. Du genre 500, 300, 200, pour l’or/argent/bronze de chaque catégorie. Et derrière, équilibrer le top 3 avec l’argent restant, comme 5000, 3000, 2000. Bien sûr c’est une idée lancée comme ça. Il faut derrière regarder les comptes et voir ce qui est le mieux à faire. Mais la répartition des gains conduira au succès de l’événement sur le long terme je pense. Afin d’éviter les frustrations. Et puis bon, de toute façon c’est leur concours pas le mien. Ils font ce qu’ils veulent !

Pour le Golden, non les gens ne payent pas pour participer. Ils payent pour rentrer sur le salon, c’est totalement différent. La nuance est importante. Or, Games-Workshop n’a pas besoin des peintres pour vivre, loin de là. Très loin de là. Donner de l’argent aux vainqueurs, cela revient juste à la jeter par les fenêtres. Le concours dispose déjà d’une réputation et d’une assise plus que confortable. Il n’a donc pas besoin d’aller plus loin.

La suite

La deuxième partie de l’interview est consultable ici… :)

One Comment to Interview pour Tutofig : Partie 1 (VF)

  1. wedding

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